Gilles Sebhan, né en 1967,auteur d’essais sur Jean Genet et Tony Duvert, ainsi que d’un récit sur le jeune peintre assassiné Stéphane Mandelbaum, poursuit dans des peintures sur toile et sur papier ses évocations de l’enfance et sa quête d’identité, son questionnement du désir et de la violence, sa réflexion sur la criminalité et le pouvoir aveugle de la loi. C’est dans cette perspective qu’il faut saisir les portraits de Kafka, Proust et Genet en «enfant criminel». Mais ce qui frappe surtout dans le travail de Sebhan peintre, c’est une suite de jeunes inconnus, cadrés comme sur une photo d’identité, dont le regard semble exprimer quelque chose de mystérieux, reproche, stupeur, d’une intense présence La solitude des portraits se multiplie dans les grands tableaux qui évoquent le plus souvent une arrestation, scène primitive dans laquelle il serait erroné de percevoir un simple commentaire de l’actualité, même si l’une des toiles, La rafle, a été peinte en décembre 2014, quelques jours à peine après l’arrestation dans un hammam du Caire d’une vingtaine d’hommes accusés de débauche. Entre l’idéal d’un apaisement coloré et l’angoisse d’une disparition se tiennent, fragiles et fortes,les figures de Gilles Sebhan. Arthur Dreyfus écrit au sujet de son œuvre: « Écrivain du mystère des garçons, Gilles Sebhan devient peintre et ne change pas de sujet. Gueules de coulisses, visages brûlants, décombres d’enfance : le moindre de ses yeux provoque la stupéfaction. Au diable les toiles : voici des rencontres. Avec une exceptionnelle puissance graphique, sur les cendres du portrait mondain, l’artiste invente un genre nouveau – un genre bleu-gris : le portrait bandit. » Un autre écrivain, Alain Blottière, évoque ainsi le travail de Sebhan : ""En Égypte, je me souviens qu'il y a trois mille ans, chacun, outre le dieu de sa ville, vénérait son propre dieu chez lui, à la maison. Il y en avait des milliers, chacun pouvait choisir. Ched, par exemple, figuré sous la forme d'un jeune garçon chassant les animaux malfaisants. Il protégeait ainsi la maison des nuisibles, des venimeux. C'est ainsi que je vois les portraits des garçons de Gilles Sebhan. Nimbés de leur propre lumière, ce sont des dieux, ou des saints. Et ces portraits sont des icônes." Les oeuvres de Gilles Sebhan sont régulièrement visibles à la Galerie Frédéric Moisan, 72 rue Mazarine, 75006, Paris.